Commenter une citation - Coup de pouce

Ce travail de commentaire de citation pourra par ailleurs éventuellement vous aider à analyser une citation pour une dissertation à venir.

Une citation est un concentré de significations, et elle est souvent sortie de son contexte initial. Vous devez apprendre à la regarder de près puis d'un peu plus loin, pour l'expliciter et la prolonger de vos propres réflexions.

Pour commenter une citation, il est intéressant de :

  • Comprendre qui parle et de situer cette personne par rapport au thème de l’IA. On peut penser par exemple qu’une cheffe d’entreprise liée au monde informatique sera plutôt bien disposée vis-à-vis du sujet de l’IA alors qu'un politique sera plus distant. Il faut également situer l’auteur de la citation dans le temps : un commentaire d’Alan Turing, pionnier de l’informatique, ou Elon Musk, magnat actuel de cette industrie, n’a pas la même résonance. Cette contextualisation constitue une étape capitale.
  • Voir quelle est la nature de la citation : constat, regret, mise en garde, prédiction…
  • Repérer des mots-clés qui peuvent avoir besoin d’être définis et explicités, observer le type de vocabulaire, par exemple technique. Soyez sensible au ton employé : sérieux, ironique, prophétique, provocateur, sentencieux… Portez attention à la formulation, qu'il s'agisse du niveau de langue, de jeux sur les mots, d'oppositions, de la structure de la phrase. Toute particularité syntaxique ou stylistique doit être repérée et son effet analysé.
  • Ne pas tomber dans l'écueil de la paraphrase. Si vous vous en approchez dans un premier temps, reformulez la pensée avec vos propres mots pour la rendre plus intelligible à votre auditoire.

L’essentiel du commentaire consiste à expliquer la citation, en déplier le sens, préciser d’où parle son émetteur et vers quelle idée il tend. On essaye de clarifier les sous-entendus, les non-dits. Ceci fait, on peut la commenter, abonder dans son sens ou la contester en élargissant la perspective.

Un exemple de commentaire

« L’IA n’est pas seulement notre avenir, elle est déjà notre présent. »

Cette citation, énoncée par Sundar Pichai, patron de Google, sans qu’on en ait ni la source, ni la date, est avant tout un constat. Né en 1972, cet États-Unien d'origine indienne dirige la firme américaine depuis 2015. Pichai semble ici, par le balancement qu’il imprime à sa phrase, prendre en tenaille son lecteur entre un présent et un avenir subis plus que choisis. Qu’on le veuille ou non, on doit passer par l’IA, maintenant et plus tard.

Le patron de Google a l’air de sous-entendre que les jeux sont faits, qu’il est inutile de résister à l’invasion de l’IA dans nos vies : elle se fera avec ou malgré nous.

L'adjectif possessif « notre » semble rapprocher tout un chacun du patron de Google et le mettre au même niveau, dans une acceptation commune du développement de l'IA par une humanité reconnaissante.

Cette citation invite son récepteur non seulement à considérer un futur – probablement radieux dans l’esprit de Pichai – dans lequel l’IA ferait partie intégrante de nos vies, mais surtout à prendre conscience du rôle de l’IA dans notre présent, au moment de l'énonciation, c’est-à-dire au quotidien : ce peut-être Alexa, ChatGPT, une Tesla… On sera sensible aux deux valeurs du présent, l'une de vérité générale, d'autorité en quelque sorte, l'autre d'énonciation, qui semble tout à coup rendre sensible une réalité jusqu'alors peut-être abstraite.

L’idée sous-jacente serait en quelque sorte d'amener chacun à consentir à ce qui arrive, d’entraîner une adhésion à ce qui serait inéluctable dans l'esprit du dirigeant, c’est-à-dire toujours plus d’IA dans nos vies, donc probablement toujours plus de Google, pour notre plus grand bien…

C’est cette tenaille entre présent et avenir qui rend difficile une échappatoire, entre le « pas seulement » et le « déjà », comme s’il était impossible de fuir un destin scellé aussi bien ici et maintenant que demain. C’est très adroit de la part de M. Pichai de commencer sa phrase par l’avenir et de nous ramener à notre présent plutôt que l’inverse. C'est une façon de suggérer que nous sommes peut-être déjà prisonniers de ce futur, grâce cette technologie tentaculaire, et que le futur passe par ce présent technologique qui mènera à coup sûr vers un futur qui le sera encore davantage. 

Nous avons donc affaire à une citation un peu partisane, qui se présente objectivement comme un constat incontestable. On peut sortir de cette tenaille en arguant que le recours à l’IA fait encore l’objet d’un choix de la part des utilisateurs, qu'ils gardent une part de libre arbitre. Des régulations nationales et internationales vont probablement limiter l’étendue de cette technologie, qui, si elle apporte beaucoup à l’être humain, n’est jamais gratuite. D’énormes intérêts financiers et industriels sont en jeu, sans parler des questions éthiques liées aux données et aux libertés individuelles. Car si l’IA est « notre présent », elle l’est déjà parfois à notre insu. Répondons à cette citation par une autre, une mise en garde de bon sens : « Quand c’est gratuit, c’est vous le produit… »

Source : https://lesmanuelslibres.region-academique-idf.fr
Télécharger le manuel : https://forge.apps.education.fr/drane-ile-de-france/les-manuels-libres/francais-seconde ou directement le fichier ZIP
Sous réserve des droits de propriété intellectuelle de tiers, les contenus de ce site sont proposés dans le cadre du droit Français sous licence CC BY-NC-SA 4.0